La courbe de Phillips est-elle toujours d'actualité?



Projet de séries temporelles :

La courbe de Phillips est-elle toujours d’actualité ?


La courbe de Phillips de 1958 établit un rapport négatif entre inflation et taux de chômage. Plus précisément, on   comprend   qu’un   taux   de   chômage   faible   augmente   le   pouvoir de marché des salariés qui exigent des salaires plus élevés (la menace de chômage de longue durée étant faible) et font ainsi augmenter les salaires et a fortiori le niveau général des prix. Si une estimation de cette courbe a semblé représenter fidèlement  le  comportement  de  l’économie  dans   les années 1960, elle  ne  semble  plus  d’actualité. Une analyse des   séries   temporelles   mettant   en   avant   l’évolution   de   l’inflation  en  fonction  du  taux  de  chômage    de 1998 à nos jours   nous   permettra   d’évaluer   si   la   courbe de Phillips a aujourd’hui  un  sens  ou  non.



Figure 1 :  évolution  du  taux  d’inflation entre 1998 et 2012



Après   avoir   corrigé   l’IPC   des   variations   saisonnières,   on obtient une courbe linéaire croissante en fonction du temps. Cette augmentation correspond bien aux évolutions du niveau général des prix à long terme.



 L’écart-type étant faible, on peut se demander si la moyenne du taux de chômage sur ces quinze ans (8,85) est le taux naturel de long terme défini par M. Friedman (The Optimum Quantity of Money and Other Essays, Macmillan Press, 1969). En  2012,  l’indice  des  prix  à  la  consommation  a  augmenté  12,19%  par  rapport  à  celui de l’année  1998.  




Lecture : Chaque   point   de   la   courbe   correspond   à   l’IPC   et   le   taux   de   chômage   à   un   trimestre donné.


A   première   vue,   on   n’observe   pas   une   courbe   de   Phillips   régulière   sur   la   période des années 2000 et 2010. Mais, on peut avancer que deux courbes apparaissent. Entre  le  début  de  l’année  1998  et  la  fin  2001,  on  remarque  une  relation  négative  entre  le   taux  de  chômage  et  l’inflation  en  France.  Cette  relation  est  encore  plus  forte  entre  2005   et 2007 (compris). Par contre entre 2001 et 2005 et entre 2008 et 2012, on observe la conjugaison   d’inflations   fortes   (une   augmentation   de   26%   par   rapport   à   1998   en   2012)   et de taux de chômage élevés (9,7%) en novembre 2012.



Méthodologie :



Nous avons fait appel aux sources macro-économiques de l’INSEE mises à jour le 12 /12/12 : nous avons emprunté les chiffres du taux de chômage en France métropolitaine de 1998 à 2012 selon la définition du BIT et les normes européennes. Les enquêtes régionales localisées ont été généralisées à l’échelle nationale. Ces chiffres sont donnés par l’INSEE désaisonnalisés.


Pour l’estimation de l’inflation nous avons pris comme IPC l’indice de la consommation de l’ensemble des biens et des services par tous les ménages de France métropolitaine entre 1998 et 2012, en base 1998. Nous avons corrigé l’IPC des variations saisonnières.



Cette enquête se fondant sur des chiffres mensuels, nous avons calculé les moyennes trimestrielles des années 1998 à 2012 pour obtenir des séries temporelles comparables. Nous faisons donc correspondre les chiffres trimestriels du taux de chômage et de l’inflation. Nous avons choisi 1998 car les chiffres IPC débutaient à cette date et que l’estimation de la courbe de Phillips nécessite de faire appel à des chiffres relativement anciens pour dénoter (ou non) une relation de corrélation Les points de rupture de la courbe de Phillips sont signalés par une droite horizontale.


On peut supposer que les deux courbes de Phillips observées correspondent à des anticipations inflationnistes qui ont déplacé la courbe vers le haut. En revanche, depuis   2008   et   la   diffusion   de   la   crise   à   l’ensemble   de   l’économie   française,   on   se   rapproche   d’une   situation   de   stagflation   qui   conjugue   taux   de   chômage   et   inflation   élevés.   On   peut   conclure   que   la   relation   de   Phillips   n’est   pas   un   outil   efficace   pour   estimer   les   mécanismes   économiques   à   l’heure   de   la   crise.   En   revanche,   elle   pourrait   l’être  lorsque  l’économie  retrouve  sa  conjoncture  de  croissance.   




Projet réalisé par Alice Kantor, Pascal Kluge et Victor Lavialle à l'ENSAE en janvier 2013.



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